LXXX
BONNE ANNÉE
Tous ces cadeaux, en temps d’étrennes, arrivent à remuer plus de tristesses que de joies. Car personne n’est assez riche pour entrer dans l’année nouvelle sans faire beaucoup d’additions ; et plus d’un gémira en secret sur les nids à poussière qu’il aura reçus des uns et des autres, et qu’il aura donnés aux uns et aux autres, pour enrichir les marchands. J’entends encore cette petite fille, dont les parents ont beaucoup d’amis, et qui disait, en considérant le premier buvard qu’elle recevait à une fin d’année : « Bon, voilà les buvards qui arrivent. » Il y a bien de l’indifférence, et aussi des colères rentrées, dans cette fureur de donner. L’obligation gâte tout. Et en même temps les bonbons de chocolat chargent l’estomac et nourrissent la misanthropie. Bah ! Donnons vite, et mangeons vite ; ce n’est qu’un moment à passer.
Venons au sérieux. Je vous souhaite la bonne humeur. Voilà ce qu’il faudrait offrir et recevoir. Voilà la vraie politesse qui enrichit tout le monde, et d’abord celui qui donne. Voilà le trésor qui se multiplie par l’échange. On peut le semer le long des