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directe sur l’application de ces idées à l’expérience, et sur ce que pourrait être l’expérience sans elles, je vois surtout à remarquer, avec l’analyse mouvante du Philèbe, un passage du Politique, presque perdu, mais sans doute à dessein, dans ce dialogue énigmatique, où, encore plus que dans le Sophiste, il semble que Platon veuille définir le personnage extérieur par les moyens extérieurs, ce qui égarerait tout à fait sur les vrais moyens de fixer l’expérience en nos pensées. Je dois dire ici en passant ce que j’ai fini par croire de ces deux dialogues désespérants, c’est que ce sophiste et ce politique représentent deux degrés de l’opinion, et déterminés par les deux degrés de l’opinion, le premier, homme d’apparence, et le second, homme d’expérience. Mais voici un meilleur objet ; voici la nature toute seule, sans le pli de coutume. Voici l’aigu et le grave courant à travers les sons, comme courent en d’autres expériences le chaud et le froid, le rapide et le lent, le grand et le petit, chacun retrouvant partout son contraire à côté de lui, et son contraire en lui-même. Ici, et aussi loin que