Page:Alain - Minerve ou de la Sagesse, 1939.djvu/212

Cette page a été validée par deux contributeurs.
MINERVE OU DE LA SAGESSE

et toujours imiter, prendre forme d’après le voisin, et plier son corps à d’autres sottises que la nôtre, qui suffit bien. Mais reculez un peu, refusez le français que les interprètes à casquette nous lancent en douche tous les matins ; allez chercher le français à la charrue de Picardie ou de Touraine ; il vous paraîtra que la sottise du jour n’y est point. Une autre sottise d’ancien temps ? Peut-être. Mais celle-là je la sens durable et fructueuse. Reculez encore. Mieux dans Descartes, mieux dans Montaigne, mieux dans Rabelais. D’où vous viendrez à estimer encore plus ces immobiles paroles à toujours, grecques, romaines ; instruments et monuments qui n’ont point de part à l’absurde rumeur quotidienne. Alors, du moins, la position de la langue sur l’alvéole et contre le palais n’est pas la première précaution pour bien penser.

— 208 —