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HUITIÈME LETTRE

qu’il faut apprendre à voir, mais on sait moins qu’il faut toujours apprendre, et renvoyer chaque chose à sa place ; soutenir enfin ce monde comme Atlas, ce monde qui retombe sur nous dans notre sommeil. Ces jeunes filles furent d’abord, et furent toujours un petit moment, comme une frise en mouvement, peut-être de mouettes sur le sable, et non séparées de ces filets de bleu pur, comme on voit les émaux. Je rappelle ces images en naissance pour faire entendre ce que c’est que voir, et comment la mimique des doigts donne un sens au relief, et celle des jambes, aux chemins. Le sentiment de la nature tient au sublime par ceci, qu’il nous fait saisir comme un spectacle des choses toutes et toujours redoutables, sous cette condition de paix intérieure, mais active et gouvernée, sans laquelle nous ne les verrions seulement pas. Car que peut voir de l’incendie