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PROLOGUE D’AVANT-GUERRE

dans l’avenir il n’en sera plus de même ; donc payez et bénissez le gouvernement de la Renaissance Nationale. »

Les mêmes hommes ont dit cent fois, au sujet de la loi de trois ans, qu’il s’agissait seulement de la défense du territoire, en présence de l’Attaque Brusquée, toujours possible par l’ambition conquérante de nos voisins. Mais ce n’était pas leur véritable doctrine ; nous la devinions alors, nous la voyons paraître maintenant. « Il ne suffit pas, veulent-ils dire, que la France soit en mesure de repousser une attaque sur ses frontières. Il faut encore que, dans n’importe quel débat Européen, elle puisse faire sonner aussi son épée. Il faut que l’on sache qu’elle n’est pas disposée à épuiser tous les moyens de conciliation ; elle doit retrouver quelque chose de cet honneur chatouilleux qui fut la gloire du second Empire. La loi de trois ans voulait montrer qu’il y a quelque chose de changé en France, et que nous ne supporterions plus ni Tanger, ni Algésiras, ni Casablanca, ni Agadir ».

Il faut mettre cette thèse au jour, et répéter au sujet de cet Empire et de cet Impérialisme : « L’Empire, c’est la guerre ». Il faut opposer une politique résolument pacifique à une politique résolument guerrière. Il faut dire hautement que les radicaux, en négociant, en temporisant, en faisant voir un réel amour de la paix, n’ont point déshonoré la France. Il faut maintenir que, si la France n’a pas tiré l’épée contre l’Allemagne à propos du Maroc, ne ce fut ni par faiblesse, ni par peur, mais réellement par raison. Il y a des provocateurs partout, chez nous comme chez les Allemands ; et les passions guerrières sont

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