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LE CITOYEN CONTRE LES POUVOIRS

Les choses se passent plus simplement qu’on ne croit. Le préfet, dès qu’il est surveillé, administre au lieu d’intriguer avec les Salons, avec les Chefs militaires et avec les Messieurs prêtres. Le député, dès qu’il se sent surveillé, parle au nom de cette opinion réelle et agissante, dont il éprouve continuellement la pression. Le ministre, dès qu’il considère les masses électorales remuantes et décidées, se moque des Académiciens et des Actrices, et gouverne en plébéien ; ce qui est aussi amusant que de gouverner en parvenu. Combes fut l’homme qui joua ce jeu spontanément et pour son compte, et qui sut rappeler aux députés ce que les délégués des Comités Politiques leur avaient déjà dit. Quand la politique républicaine, car c’est son nom, est ainsi orientée et vivante, on trouve toujours un Combes. Si vous demandez ce que fera le Combes de l’avenir, je réponds qu’il ne fera rien qu’administrer et empêcher le mal qui s’appelle négociation ambitieuse, traité secret, alliance avec les droites, politique de force, Guerre. Rien n’est plus simple, mais il faut s’y mettre. Un prêtre pourrait être Combiste. Car il n’est point vrai que cette politique, radicalement républicaine, ait pour fin de contrarier ou de favoriser telle ou telle opinion de l’ordre moral ou religieux. Et le vrai prêtre se sent même plus libre et plus digne, lorsqu’il n’est plus l’allié ni le serf des puissances politiques. Mais les prêtres qui se mêlent de politique ne peuvent pas être Combistes. Un académicien ne peut pas être Combiste. Un général ne peut pas être Combiste. Un millionnaire ne peut pas être Combiste. Une actrice ne peut pas être Combiste. Un député cesse d’être Combiste dès qu’il peut. Je fais exception

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