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veillant au visage passionné. Les bouts de sa corde à sauter, enroulée autour de sa taille, s’entrechoquaient. Et, durant une triste soirée, nous avons revu ce blanc halo des visages de femmes que celui-là nous avait rappelés.

Soldats, nous l’avons encore rencontrée, quand nous cherchions la Très-Aimée. Elle était devenue « la » femme empoisonnée de la garnison, et, pourtant, l’unique douceur à regarder. Elle avait ses cheveux en bandeaux et deux plaques rouges, aux pommettes, de fard ou de sang vicié. Elle était venue vers midi, attendre son mari à la porte de la caserne. Quand nous sommes passés, elle était là, toute gauche, appuyée sur son parapluie, comme une petite pauvresse. Elle s’est mise à baisser la tête, pour s’empêcher de rire ; et son grand chapeau lui cachait le visage jusqu’au

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