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albert d'aix.

reuse victoire, tuèrent les misérables pélerins et les poursuivirent, ne cessant de les massacrer, pendant une marche de trois milles et jusqu’au lieu où étaient dressées les tentes de Pierre. En entrant dans le camp, les Turcs firent périr par le glaive les faibles et les malades, les clercs, les moines, les femmes âgées, les enfans à la mamelle, n’ayant aucun égard pour l’âge, réservant seulement les jeunes filles et les religieuses dont les traits et la beauté parurent faire impression sur leurs yeux ; ils emmenèrent aussi les jeunes garçons encore imberbes et qui avaient de beaux visages ; ils transportèrent également à Nicée l’argent et les vêtemens, et s’emparèrent des chevaux, des mulets, de tous les objets précieux et des tentes même.

Il y a sur le rivage de la mer et non loin de Civitot, une forteresse antique et abandonnée, vers laquelle trois mille pélerins se retirèrent dans l’espoir de pouvoir s’y défendre. Mais n’y ayant trouvé ni portes ni barricades, privés de secours et en même temps fort inquiets, ils entassèrent leurs boucliers, firent rouler d’énormes blocs de pierre à l’entrée du château et se défendirent vigoureusement avec des lances, des arcs en bois et des pierres qu’ils lançaient à la main. Les Turcs, ne pouvant parvenir à détruire ceux qui s’étaient ainsi renfermés, enveloppèrent de tous côtés le fort qui n’avait point de toiture, et se mirent à lancer des flèches en l’air, afin qu’en retombant verticalement elles pussent frapper les assiégés et tuer ces malheureux, et que les autres, effrayés par cet exemple, fussent contraints de se rendre. On dit qu’en effet un grand nombre de Chrétiens furent blessés et