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me semble que vous êtes fort bien et que rien ne vous manque.

— Merci du compliment, señor Galeano ; en effet il ne me manque rien ; j’ai, au contraire, quelque chose de trop.

– Bah ! quoi donc ?

— La barbe.

— Ah ! caramba ! je n’y songeais plus ; le fait est que cette grande barbe que vous portez, je ne sais pourquoi, vous donne un air singulier, et jure avec le reste de votre costume ; vous avez eu là une drôle d’idée, señor ?

– Pas aussi drôle que vous le croyez ; si, pendant huit mois, j’ai laissé pousser ainsi ma barbe, mon camarade, répondit-il d’une voix railleuse, c’est tout simplement afin de la raser aujourd’hui, et me rendre complétement méconnaissable, en donnant un autre tour à mes cheveux.

— Puñala ! voilà une magnifique pensée ! Je ne m’en serais jamais avisé, moi ! La chose est impayable ! fit-il en riant à gorge déployée.

– Ah ! vous comprenez ?

– Je le crois bien, señor don Carlos ! vous êtes un homme très-fort ; je m’incline devant vous.

— Au lieu de vous moquer de moi, ami Galeano, vous feriez mieux de m’indiquer un barbier, si vous en comptez un dans vos nombreuses connaissances ; je n’ose me risquer à entrer chez le premier venu.

— Caraï ! vous avez raison ; on vous prendrait pour le diable ; cela causerait un scandale horrible ; mais laissez-moi faire ; j’ai là, tout près, calle San-Juan de Dios, un compère qui est barbier ; je me charge d’arranger cela.