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Ces trois personnes se tenaient un peu en arrière des autres passagers ; elles formaient un groupe charmant, séparé des autres par une distance de trois ou quatre pas au plus.

Au moment où la baleinière débordait du Hasard, la jeune fille, gracieusement appuyée sur le bras de sa mère, lui disait d’une voix douce et harmonieuse, dont l’accent semblait une caresse :

— Tu verras, mamita chérie, que je t’ai dit vrai, et que mes pressentiments ne m’ont pas trompée.

— Chère folle ! répondit la mère en la baisant au front, il est bien loin en ce moment, sans doute ! Tu ne penses qu’à lui !

— Parce qu’il est notre ange gardien, que chaque fois qu’il nous apparaît, c’est pour nous préserver d’un malheur.

— Je suis fâchée, Dolorès, de te voir des idées aussi exaltées ; calme-toi, ma chérie. Tu n’es plus une enfant.

— C’est vrai ; je suis une jeune fille, répondit-elle en faisant une moue charmante ; j’étais bien plus heureuse quand j’étais une enfant.

— Quelle singulière idée ! Pourquoi regrettes-tu d’être une jeune fille, ma chérie ?

— Dame ! mamita, parce que je ne puis plus parler comme je le faisais, et te dire tout ce qui me passe par la tête. Je suis obligée d’être bien sérieuse, bien posée, de mesurer mes paroles, de baisser les yeux, que sais-je encore ? Cela n’est pas amusant du tout, mamita ; sans compter que maintenant tu m’empêches toujours de parler de lui ?

— Avec l’exaltation que tu y mets, chérie ? parce que cette exaltation n’est pas convenable de la