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sur l’autre, puis roulait sur lui-même, ses voiles faséiaient ; en somme, il semblait ne pas gouverner du tout, car parfois toutes ses voiles étaient masquées.

La situation du navire devenait critique ; sa mâture menaçait de se rompre, dans un coup de tangage qui ferait masquer en grand toute la voilure : il fallait monter à bord au plus vite, afin d’éviter un irréparable malheur, car il était évident que le navire était abandonné, ou que, pour des raisons inconnues, on le laissait sans direction.

Les baleinières firent le tour du navire ; elles hélèrent l’équipage, sans qu’il leur fût répondu, et elles s’assurèrent avec dépit qu’il ne pendait aucun bout de corde auquel on put s’accrocher pour se ranger le long des flancs du navire et monter à bord.

M. Mauclère se mordait les lèvres avec une colère sourde, et se demandait comment il parviendrait à s’élancer sur le pont de cet inabordable bâtiment, lorsque tout à coup il se frappa joyeusement le front en s’écriant :

– J’ai trouvé !

Le digne marin, comme tous les frères de la côte de cette époque, avait eu une existence assez aventureuse, et avait fait à peu près toutes les navigations, même les plus excentriques ; entre autres, il avait été baleinier et pêcheur de veaux marins ; le moyen qui lui revint subitement à la pensée, et qu’il mit aussitôt à exécution, se rattachait à ces deux derniers métiers : il s’agissait simplement, pour lui, de harponner le trois-mâts, comme jadis il harponnait les baleines.

À la vérité, le harpon manquait, mais il y avait