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porte s’ouvrit sans bruit, et un homme parut, tout vêtu de noir des pieds à la tête.

C’était le médecin.

Le docteur don Jose Legañez n’avait que trente-deux ans et en paraissait plus de quarante ; il était grand, maigre, sec, anguleux ; il avait une figure de renard, éclairée par deux petits yeux ronds brillants comme des escarboucles, enfoncés dans l’orbite et très-éloignés du nez, un front fuyant, un nez en pointe, des pommettes saillantes, une bouche aux lèvres minces et rentrées, un menton à peine accusé ; le teint blafard, les cheveux rares et gras, tombant en longues mèches sur ses joues glabres ; il ne portait ni perruque, ni poudre.

Tous ces traits réunis formaient au docteur Legañez une physionomie presque repoussante, sur laquelle se lisaient en toutes lettres la fourberie et l’astuce poussées à leurs suprêmes limites ; cependant, malgré ces dehors peu sympathiques, cet homme avait la réputation d’un savant praticien et d’un excellent médecin ; et cela était vrai ; le docteur Legañez était réellement habile ; mais il était ambitieux et surtout très-fin ; il avait pénétré, plus que ne le supposaient les deux hommes, le secret que ceux-ci prétendaient lui cacher ; et comme il voulait arriver à la fortune, par tous les moyens possibles, même les plus scabreux, il s’était promis, dans son for intérieur, le moment venu, d’exploiter à son bénéfice le secret dont il se croyait presque le maître.

— Voilà un vilain homme ! pensa le cousin Perrico mais il se garda bien de laisser voir cette mauvaise impression.