Vers l’âge de six ans, je fis une maladie très-grave : j’eus une fièvre cérébrale, compliquée de fièvre putride et de fièvre maligne ; on me rasa complétement la tête, ce qui fut un bonheur pour moi quand je fus guéri ; mes cheveux repoussèrent châtains ; avec les années, ils sont devenus presque noirs.
Mais je n’en étais pas quitte avec les maladies : quelques mois plus tard, je dus souffrir l’ablation des amygdales elles s’étaient extraordinairement gonflées et menaçaient de m’étouffer, si l’on ne se hâtait de m’en débarrasser.
Il y eut une consultation de médecins ; l’opération fut résolue ; les opérateurs choisis étaient les docteurs Dupuytren, Dubois et Marjolin. Ces trois noms appartenant à des princes de la science, et qui ont dû se faire payer très-cher, sont restés obstinément dans ma mémoire.
Mais ce n’était pas chose facile d’obtenir de moi que je consentisse à l’opération et que je me prêtasse bénévolement aux exigences des médecins.
Je me souviens qu’on voulut m’attacher pour m’opérer plus à l’aise, et que je me débattis comme un beau diable, unguibus et rostro ; je ne consentais, sous aucun prétexte, à me laisser approcher ; je donnais coups de pieds et coups de poings quand on essayait de m’approcher ; tous les raisonnements les plus insinuants étaient en pure perte.
– Voyons, me dit, en désespoir de cause, le docteur Dupuytren, que veux-tu pour te laisser faire on te le donnera…
– Je ne veux pas être attaché, répondis-je ; cela m’humilie…