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vie ; leurs traits eussent été beaux, sans les peintures dont ils avaient cru devoir les couvrir ; leur regard était fier, leur physionomie sombre, mais empreinte d’une indicible grandeur.

Ils ne portaient pas d’armes apparentes, mais chacun d’eux tenait à la main droite un magnifique éventail fait d’une aile d’aigle de montagne ; les nombreuses chevelures dont les harnais de leurs chevaux étaient garnis, et les longues queues de loups rouges attachées à leurs talons, indiquaient non-seulement que ces Chefs étaient des grands braves, mais encore des Sachems illustres de la nation.

Olivier, après avoir confié ses armes apparentes à la vieille Indienne, engagea son cheval au galop de chasse et s’avança à la rencontre des chefs le bras droit étendu, la main ouverte, les doigts réunis et la paume en dehors.

Arrivé à dix pas des Indiens, qui s’étaient arrêtés, il fit halte lui aussi, et élevant la voix, afin que ses paroles parvinssent distinctement aux oreilles de ceux à qui il les adressait :

— Que l’œil du Wacondah, dit-il, ne se détourne pas des Kenn’as-Castors ; qu’il leur donne de bonnes chasses, et qu’il rende leurs ennemis craintifs comme des chiens des prairies et aveugles comme des taupes ; un ami les salue et désire qu’il ne s’élève aucun nuage entre eux et lui.

Le plus âgé des Sachems fit faire un ou deux pas en avant à son cheval, et répondit d’une voix forte avec un accent guttural, mais sans apparence d’hostilité :

— Le chasseur pâle s’est enfoncé fort loin dans la savane : sans doute il s’est égaré et cherche