Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Restez là, leur dit-elle vivement ; vous ne pouvez m’être utiles en rien, mieux vaut vous tenir à l’abri. Ici vous ne courez aucun danger.

— Mais que prétendez-vous faire, malheureuse enfant ?

— Ne vous inquiétez pas de cela ; reprit-elle avec son charmant sourire ; qu’ils essaient de défoncer la porte ; alors vous verrez si la fille adoptive des frères de la Côte sait manier un gelin ? pendant que je veillerai à la barricade, priez Dieu ! seul il peut nous sauver !

Et comme en ce moment, on commençait à frapper des coups violents sur la porte, la jeune fille s’élança dans l’antichambre, s’embusqua derrière la barricade, s’assura froidement que ses armes étaient en état, et attendit le sourire sur les lèvres en murmurant d’une voix douce, presque enfantine :

— L’Olonnais sera content, quand il saura comment je me suis conduite.

Pendant un instant, les coups cessèrent, la voix du Chat-Tigre se fit de nouveau entendre.

— Pour la dernière fois, cria-t-il, voulez-vous ouvrir ?

— Pourquoi n’ouvrez-vous pas comme je vous l’ai dit déjà ? répondit Fleur-de-Mai en riant.

— Prends garde, enfant, cette folle résistance te coûtera cher.

— Oui, elle coûtera cher à quelqu’un ; sera-ce à moi ? sera-ce à vous ? voilà ce que j’ignore ; croyez-moi, Chat-Tigre, ne vous obstinez pas à pénétrer malgré nous dans cet appartement ; fuyez plutôt si vous en avez le temps, c’est un bon conseil que je vous donne.

— Trêve de verbiage ! ouvre-moi, te dis-je ?

— Je n’ouvrirai pas, je suis résolue à me défendre, ne m’obligez pas à le faire.

— Vive Dieu ! c’est trop attendre ; s’écria le Chat-Tigre avec colère, tant pis pour vous, vous seule serez responsable de ce qui arrivera.

— Soit ! je suis prête à en subir toutes les conséquences.