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de cette situation, et je le jure, nous en sortirons !

— Avez-vous donc trouvé un moyen ? lui demanda doucement la duchesse.

— Non ; je le cherche ; mais il est évident que je le trouverai bientôt, dans tous les cas, il est important que nous sachions ce que l’on veut faire de nous ; puisque le Chat-Tigre s’obstine à ne pas nous le dire, je vais le lui demander, moi.

— Eh quoi ! s’écria la duchesse ; vous allez nous laisser seules ici ?

— Il le faut ! je ne veux pas rester la nuit dans ce coupe-gorge, où nous n’avons rien pour nous défendre ; où l’obscurité venue, nous serons complétement au pouvoir de ces misérables ; cela ne peut pas être. Si cruel et si scélérat, que soit le Chat-Tigre, il doit par quelque point se rattacher à l’humanité ; peut-être en m’expliquant franchement avec lui, réussirai-je à le faire rentrer en lui-même, et à lui faire comprendre ce que sa conduite a d’odieux et d’infâme.

— Vous vous abusez, chère enfant, reprit la duchesse en hochant tristement la tête ; cet homme est une bête féroce ; rien ne parviendra ni à le toucher ni à l’attendrir ; peut-être en tentant cette épreuve, augmenterez-vous encore l’horreur de notre captivité, et vous exposerez-vous vous-même à sa colère.

— Eh bien soit ! j’en courrai les chances ! s’écria résolûment la jeune fille.

— Mais au moins, reprit la duchesse avec prière, attendez encore ; d’un moment à l’autre cet homme peut se résoudre à venir ; ne vaut-il pas mieux prendre un peu patience que d’exhalter sa colère, en lui demandant des explications qu’il refusera de donner, s’il croit qu’on veut les lui imposer ?

— Non, non, dit Fleur-de-Mai en secouant la tête ; ma patience est à bout ; depuis quatre ou cinq heures que je suis enfermée dans cette prison, il me semble que j’ai vieilli de dix ans. Je suis une enfant des forêts moi, il me faut le grand air et la liberté ; je ne respire pas,