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— Venez un peu par ici, monsieur le duc, et permettez-moi de vous dire deux mots à part.

— À vos ordres, monsieur.

Les deux hommes s’écartèrent de trois ou quatre pas.

— Eh bien ? demanda le duc.

— Plus bas, monseigneur, fit Vent-en-Panne, ce que nous avons à nous dire ne doit pas être entendu ; écoutez bien ceci : les deux principaux banquiers de la ville, le señor don Pedro Lozada et Cie, et le señor don Jose Salazar Aguirre et Cie, ont en ce moment, dans un magasin secret que je connais, chacun quatorze millions de piastres en lingots d’or et d’argent ; le señor Santa-Cruz, a onze millions de piastres ; la Conducta de Plata, arrivée il y a trois semaines de Mexico, a apporté en lingots, neuf millions de piastres ; plusieurs autres négociants que je pourrais vous nommer, ont entre eux huit autres millions, je passe le menu fretin. Toutes ces sommes doivent être expédiées incessamment en Espagne sur les galions de Panama.

— Eh quoi, monsieur ! s’écria le duc au comble de la surprise, il en serait ainsi ?

— Je vous l’affirme sur l’honneur, monsieur le duc, vous me connaissez, je ne mens jamais.

— Oh ! si cela est ! s’écria le duc d’un ton de menace.

— Cela est, reprit Vent-en-Panne en se rapprochant des autres parlementaires, mais comme l’explication que je vous ai donnée a bien sa valeur, j’en suis fâché, monsieur le duc, les fripons doivent être punis, et ils le seront, je vous le promets, d’une façon exemplaire. Si d’ici à une demi-heure, trente millions de piastres en lingots d’or ne sont pas apportés sur le môle, et disposés pour être embarqués sur mes navires, dans trente-cinq minutes je mets le feu aux quatre coins de la ville et j’ordonne le pillage.

— Monsieur, je vous en prie ?

— Pas un mot de plus, monsieur le duc, je ne me suis