— C’est entendu ; adieu, compadre ; que Dieu vous protège, chère enfant !
— Merci, vous êtes bon, je me souviendrai de vous ; dit la jeune fille avec âme.
— Allons, venez, la belle fille, et marchez comme si vous dansiez sur des œufs.
Sans répondre, Fleur-de-Mai suivit le geôlier, qui avait refermé la porte, et la guidait à travers un dédale presque inextricable de corridors ; après un quart d’heure de marche environ, le geôlier s’arrêta devant une porte, l’ouvrit doucement, et poussant légèrement la jeune fille :
— Vous voici arrivée, lui dit-il ; maintenant agissez comme vous le voudrez, cela ne me regarde plus.
Et sans attendre de réponse, il referma la porte sur elle et s’éloigna ; l’Olonnais dormait tout habillé, sur un châlit placé dans un angle de la pièce ; une lanterne fumeuse brûlait sur une table.
La jeune fille demeura un instant immobile ; la rougeur au front, le regard ardemment fixé sur le dormeur ; puis elle se débarrassa du manteau et du chapeau qui la déguisaient ; tenant les deux fusils serrés dans ses mains mignonnes, elle s’approcha à pas de loup de l’Olonnais et se penchant sur lui, elle lui frappa doucement sur l’épaule ; le jeune homme s’éveilla aussitôt.
— Fleur-de-Mai ! s’écria-t-il, toi ici ?
— Oui, répondit-elle.
— Que viens-tu faire, malheureuse enfant ?
— Je viens l’apporter des armes et mourir avec toi ; répondit-elle avec un charmant sourire.
— Oh ! dit-il ; je suis indigne d’un tel dévouement !
— Ce n’est pas du dévouement, dit l’enfant en secouant la tête.
— Qu’est-ce donc alors ?
— Je ne sais pas. Je me sens malgré moi attirée vers toi, et tu le vois, me voici !