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d’un geste à la jeune fille de garder le silence ; puis il frappa trois coups légers sur la porte, en même temps qu’il sifflait d’une certaine façon ; presque aussitôt la porte s’ouvrit sans produire le moindre bruit, et un homme parut.

Cet homme était le guichetier.

— Eh ! compadre, dit-il, je ne vous attendais pas cette nuit ?

— Je viens toujours quand on ne m’attend pas, compadre ; répondit en riant le Mexicain.

— M’apportez-vous une bonne nouvelle ?

— Non, mais une bonne aubaine.

— Oh ! oh ! quoi donc ?

— Dix onces que j’ai là dans ma main, regardez ?

— Je les vois ; dit l’autre dont le regard brilla ; dix onces, c’est une grosse somme ; que faut-il faire pour la gagner ?

— Presque rien.

— Mais encore ?

— Ouvrir la porte de la prison du Ladron, faire entrer cette jeune fille, refermer la porte derrière elle, et aller vous coucher ; vous voyez que c’est facile ?

— Diable ! fit l’autre avec embarras, facile ? pas tant que cela ! savez-vous que ce Ladron est un gaillard peu commode ; j’avais laissé entrer deux dames dans sa prison, il m’a menacé si je recommençais, de se plaindre au commandant, et de me faire perdre ma place, vous comprenez ?…

— Je comprends que vous êtes un imbécile, compadre, il y a femme et femme, comme il y a fagots et fagots ; je vous réponds que celle-ci ne vous attirera pas de désagréments ; au contraire le prisonnier vous remerciera.

— Vous en êtes certain ? reprit l’autre, en hésitant.

— Je vous l’affirme ! reprit don Pedro, en faisant danser les onces dans sa main.

— Allons, donnez ; il faut toujours faire ce que vous voulez, compadre ; mais s’il m’arrive quelque chose c’est à vous que je m’en prendrai.