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Vive fut la surprise du capitaine, lorsqu’en entrant, il aperçut Fleur-de-Mai assise et cousant aussi tranquillement, que si elle eut été dans sa maisonnette du bois de Lamentin.

Au bruit des pas du capitaine, la charmante enfant releva la tête et le regarda en souriant :

— Que diable fais-tu là, fillette ? ne put s’empêcher de dire Vent-en-Panne.

— Ne m’en veuille pas, capitaine, répondit-elle en fixant sur lui ses grands yeux bleus, si clairs et si purs ; je me suis embarquée en cachette, parce que si j’avais demandé la permission de monter à bord, on me l’aurait refusée.

— C’est plus que probable ; répondit-il d’un ton bourru.

— Tu te fâches, capitaine, tu as tort.

— Mais que diable ferai-je de toi, ici ?

— Je prierai pour toi et pour nos frères et j’aiderai à panser nos blessés.

— Mais, chère enfant, reprit-il avec embarras, ta position au milieu de nous n’est pas convenable.

— Pourquoi donc cela ? tout le monde m’aime, personne ne cherche à me faire du mal, je n’en ai jamais fait à personne.

— Mais enfin, voyons, pourquoi t’es-tu embarquée en cachette, et as-tu voulu suivre l’expédition ?

— Ce que tu dis là, capitaine, est mal ; tu me demandes mon secret ; si tu l’exiges, il faudra bien que je te le dise, et cela me fera beaucoup de peine ; ajouta-t-elle les larmes aux yeux.

— Allons, méchante enfant, ne pleure pas ; je ne te demanderai rien ; au diable les femmes ! ajouta-t-il à part lui, en grommelant. Reste à bord, puisque tu y es et que je ne puis faire autrement que de te garder ; tu habiteras cette cabine, je te la cède.

— Mais toi, capitaine, où te logeras-tu ? je ne veux pas te priver de ce qui t’appartient ; puisque tu me permets de rester, n’importe quel coin me suffira.