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— Pardieu ! je n’avais pas songé à cela, dit l’Olonnais d’un air pensif, ton conseil est bon, je suis d’avis de le suivre.

— C’est la chose la plus facile du monde.

— Eh bien, écoute : en ce moment je ne puis quitter la ville ; demain j’ai un rendez-vous important qui me retiendra peut-être plusieurs heures !…

— Ah oui, je sais ! la lettre de ce soir.

— Justement, mon ami ; tu monteras à cheval, et tu sortiras de la ville, comme si tu allais à Manantial ; nous sommes déjà sortis et rentrés plusieurs fois, sans attirer l’attention ; il est évident que cette fois personne ne songera à t’inquiéter. Je laisse à ta prudence le soin de dépister les espions qui se mettraient à tes trousses ; tu te rendras aussi directement que possible à l’endroit où nous avons débarqué, tu demanderas les instructions de Vent-en-Panne ; cela fait, tu reviendras.

— C’est entendu, matelot.

Les deux jeunes gens échangèrent encore quelques mots entre eux, puis ils se couchèrent ; cinq minutes plus tard, ils dormaient à poings fermés.

À six heures du matin, c’est-à-dire au lever du soleil, ils étaient debout. Pitrians prit un costume de cheval, plaça plusieurs marchandises de choix dans une espèce de balle-valise, alla trouver l’hôtelier avec lequel les jeunes gens avaient eu soin d’entretenir d’excellentes relations, lui dit qu’il désirait se rendre à Manantial porter des marchandises qu’on lui avait demandées, et lui proposa de lui louer un cheval.

L’hôtelier trouva tout naturel ce que lui disait le jeune homme, il mit aussitôt son cheval favori à sa disposition ; Pitrians après avoir consciencieusement bu le coup de l’étrier, sauta en selle, alluma une cigarette et s’éloigna au grand trot, en fredonnant une Jota aragonaise.

L’Olonnais procédait plus longuement à sa toilette, il montrait même une certaine hésitation, tout en s’ajustant de la façon la plus coquette, qu’il put imaginer ;