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bouche avant de parler ; surtout suivez les conseils que vous donne un ami.

— Certes je les suivrai ! je ne me soucie pas, moi honnête et paisible marchand, de me mettre dans l’embarras ; seulement je vous certifie que, aussitôt que j’aurai réussi à me défaire de mes marchandises, je partirai sans regarder derrière moi.

— Et vous ferez bien, mon maître ! quant à présent faites contre fortune bon cœur, ne laissez rien paraître de ce que vous éprouvez ; évitez surtout de remettre les pieds chez le duc.

— Oh ! quant à cela, soyez tranquille, señor don Pedro ; je m’en tiendrai toujours au moins à cent varas ; cependant je vous avoue que ce sacrifice m’est fort pénible ; c’est une maison où j’ai trouvé à vendre mes marchandises dans d’excellentes conditions ; la duchesse et sa fille sont généreuses, elles ne chicanent pas sur les prix ; que le diable enlève tous les forgeurs d’histoires ! ces gens là n’ont donc rien à faire qu’ils passent leur temps à s’occuper ainsi des autres !

Don Pedro se mit à rire.

— Cela est ainsi pourtant, toujours, et partout, amigo.

— Pardonnez-moi ; à Mexico, nous n’avons pas de ces brouillons.

— Parce que la ville est plus grande, et qu’on se connaît moins.

— C’est possible ; ainsi vous me conseillez ?

— Tout simplement de changer votre manière de vivre.

— Bon : et pour commencer ?

— Tenez, si vous voulez pour commencer, nous irons dîner de compagnie à l’ordinaire de Guadalupe ; c’est une maison fort achalandée ; bien tenue ; fréquentée par toutes espèces de gens ; les prix ne sont pas trop élevés ; il ne sera pas mal qu’on vous y voie.

— Soit ; va pour l’Ordinaire de Guadalupe, mais ensuite, comment terminerons-nous la soirée ?