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nous possédions, nous ayons acheté cette embarcation, l’avons armée et, ma foi ! nous nous sommes mis en route à la grâce de Dieu ! Un coup de vent, que nous avons reçu il y a quelques jours, nous a fait dévier de notre route, et nous a procuré l’avantage de vous rendre un léger service.

— Cordieu, un léger service ! s’écria le capitaine Barthélemy. Dites donc que, sans vous, Pitrians et moi, nous serions bel et bien morts de faim ! Touchez là, frères, et souvenez-vous qu’à dater d’aujourd’hui vous avez un ami, sur lequel, au besoin, vous pouvez compter !

— Deux ; ajouta sentencieusement Pitrians. Je ne suis donc rien, moi ?

— Et tout d’abord, reprit Barthélemy, j’ai à Port-Margot deux navires qui m’appartiennent ; c’est vous dire que si l’argent vous fait faute, je puis vous en fournir autant que vous en aurez besoin.

— Et ça ne nous gênera pas ; ajouta Pitrians.

— Nous vous remercions, mon frère et moi, de cette offre cordiale ; dit Chanteperdrix, mais toutes nos économies n’ont pas été épuisées par l’achat de la barque ; nos ceintures, grâce à Dieu ! sont gonflées d’or espagnol ; nous ne vous serons donc nullement à charge. Le seul service que nous attendons de vous, est de nous présenter, à notre arrivée à la côte, à ceux dont nous allons devenir les frères. Soyez persuadés que nous partageons sincèrement la haine que vous portez aux Espagnols ; ce que, du reste, le cas échéant, nous saurons vous prouver.

Deux jours après, le canot dont Barthélemy avait pris la direction, atterrit dans une petite anse, située à sept ou huit lieues tout au plus de Port-Margot. Le capitaine Barthélemy par amour-propre, car il était dans son for intérieur extrêmement vexé de l’échec qu’il avait éprouvé, n’avait pas voulu entrer directement à Port-Margot ; ce à quoi ses compagnons avaient consenti facilement. Peu leur importait de débarquer à un endroit ou à un