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Bientôt ils aperçurent deux individus, portant comme eux le costume des Frères de la Côte et qui, par leurs gestes, semblaient leur indiquer la direction à suivre, pour éviter les brisants et aborder en sûreté.

Il ne leur fallut que dix minutes pour atteindre la caye.

Les premiers mots que leur dirent ces individus lorsqu’ils débarquèrent furent ceux-ci :

— À boire ! à boire !

Ces malheureux étaient pâles, semblaient exténués et en proie à une grande faiblesse.

Le Chat-Tigre et son frère, se hâtèrent de leur prodiguer tous les soins qu’ils pouvaient leur donner ; puis sur leur prière, ils les prirent à bord, les couchèrent au fond du canot, et poussèrent au large.

Bientôt les flibustiers s’endormirent d’un lourd sommeil, interrompu à plusieurs reprises pendant la nuit ; mais le lendemain, grâce aux soins qui leur avaient été donnés, ils sentirent leurs forces renaître, et se trouvèrent en état de raconter ce qui leur était arrivé ; et à la suite de quels événements ils avaient été jetés sur cette caye déserte où, s’ils n’avaient pas été recueillis par le canot, ils seraient morts de faim et de soif.

Voici en substance ce qu’ils racontèrent :

Le plus grand, le capitaine Barthélemy un des plus célèbres flibustiers de la Tortue, était parti quelques jours auparavant de Port-Margot, dans une légère pirogue, montée par un équipage de quarante hommes bien armés, pour aller, ainsi qu’il le disait, à la chasse aux Espagnols.

Cette chasse avait d’abord été très-heureuse. Dans la même journée il avait surpris deux galions, et avait jeté un équipage à bord ; puis, ces prises dirigées sur Port-Margot, il s’était remis en embuscade, avec une dizaine d’hommes qui lui restaient.

Le surlendemain au lever du soleil, la vigie avait signalé une voile. Les flibustiers s’étaient sans hésiter lancés à sa poursuite, mais cette fois ce n’était pas à des