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— Tant pis pour lui, alors ; ma sœur sera vengée, je vous le jure.

— Que voulez-vous faire ?

— Ceci me regarde seul ; dit-il d’un ton qui n’admettait pas de réplique.

— Vous ne le tuerez pas ! s’écria le médecin.

— Le tuer ? fit-il avec un ricanement sinistre ; allons-donc ! vous êtes fou, docteur. Est-ce que la mort est un châtiment ? non, je veux qu’il souffre longtemps, sa vie toute entière. Chaque seconde de souffrances de sa victime sera rachetée par des années de douleurs et de tortures incessantes.

— Vous me faites trembler, Ludovic. Quel sinistre projet avez-vous donc conçu ?

— Ne m’interrogez pas, docteur, je ne pourrais vous répondre ; ma résolution est prise ; rien ne saurait la changer.

Le docteur Guénaud baissa tristement la tête ; il connaissait cette nature de fer, l’énergie terrible de ce cœur de lion ; il savait que toutes prières, toutes observations seraient inutiles, et viendraient se briser contre une inébranlable volonté.

Le comte reprit la parole après quelques secondes :

— En quel état se trouve ma sœur en ce moment ? demanda-t-il.

— Aussi bien qu’elle peut être…

— Il y a-t-il du danger à la transporter immédiatement ?

— Aucun, en usant de grandes précautions.

— Ceci est votre affaire, docteur ; vous savez ce dont nous sommes convenus ?

— Certes !

— Êtes-vous toujours disposé à me rendre le service que j’attends de vous ?

— Disposez de moi, Ludovic ; ce que je vous ai promis, je le ferai ; plus encore, s’il le faut.

— Merci, docteur ; vous n’avez plus rien à faire ici ?