— Ce que tu dis là est très-beau ; allons ! Dieu veuille que je me trompe !
— Merci, matelot ; dit l’Olonnais en lui serrant la main.
Vent-en-Panne hocha la tête, et s’adressant à ses engagés :
— Attention, dit-il, nous avons changé de gibier ; couplez les chiens ; vous ne les larguerez qu’au bon moment ; en route et silence.
Les cinq Français se dirigèrent alors avec les plus grandes précautions vers l’endroit où les cris et les coups de feu continuaient à se faire entendre.
Après avoir marché pendant sept ou huit minutes, Vent-en-Panne s’arrêta ; ses compagnons l’imitèrent.
Un rideau de feuillage séparait seul les flibustiers des combattants, car la lutte continuait toujours.
Quels qu’ils fussent, les gens assaillis par les Espagnols résistaient avec acharnement.
— Ne bougez pas jusqu’à mon retour ; dit le flibustier, en confiant son fusil à Tributor.
Puis se courbant presque en deux, Vent-en-Panne se glissa comme un serpent au milieu des broussailles, où il disparut presque aussitôt.
L’absence du flibustier fut courte ; elle dura à peine trois ou quatre minutes.
— Eh bien ? lui demanda l’Olonnais aussitôt qu’il l’aperçut.
— L’affaire est chaude, dit Vent-en-Panne, en secouant la tête.
— Que se passe-t-il, au nom du ciel ?
— Je n’ai vu que les Espagnols ; il y a au moins deux cinquantaines, auxquelles se sont adjoints une vingtaine de bandits Espagnols, de ceux qui prétendent nous disputer la Savane, et boucaner sur nos brisées ; les nôtres sont entourés de toutes parts ; je n’ai pu les reconnaître à cause de la fumée, mais ce sont de rudes gars ; ils se défendent comme des démons ! ils doivent être de nos amis ; que faisons-nous ? il est encore temps de reculer.