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dépêches étaient importantes : elles annonçaient la déclaration de guerre faite, par le roi Louis XIV, que Dieu garde, à l’Espagne.

— Comment ! s’écria le commandant, la guerre est déclarée à l’Espagne ?

— Oui, monsieur, depuis deux mois. Il n’est pas étonnant que vous l’ignoriez puisque, depuis cinq mois, vous croisez dans ces parages.

— Ah ! de par Dieu ! voilà une bonne nouvelle ! je vous en remercie bien sincèrement, capitaine.

— Ce n’est pas à moi, mais à monsieur d’Ogeron que ces remerciements doivent revenir, commandant.

— Mais c’est vous qui me les apportez ces nouvelles !

— Par son ordre. Voici l’affaire en deux mots : monsieur d’Ogeron, votre ami, et il l’a bien prouvé dans cette circonstance, vous sachant dans ces parages, était très-inquiet sur votre compte, à cause des nombreux croiseurs espagnols qui rôdent en ce moment dans les débouquements du golfe du Mexique ; il était important que vous fussiez averti au plus vite. Malheureusement, il n’y avait pas en ce moment à Saint-Dominique un seul navire ; tous nos compagnons étaient en expédition.

— La situation était critique.

— Monsieur d’Ogeron le pensait ainsi, mais je le rassurai en moins de cinq minutes. Si vous n’avez pas de navires, lui dis-je, il nous reste des barques : préparez vos dépêches ; cette nuit je partirai. Le gouverneur me connaît ; il me serra la main, m’embrassa et notre explication en demeura là. Une heure plus tard, j’avais acheté la pirogue qui se balance le long des flancs de votre navire ; j’avais engagé vingt-cinq frères de la Côte que je connaissais de longue date, et, le soir même, un peu après le coucher du soleil, monsieur d’Ogeron m’apportait ses dépêches, je mettais le cap au large et me voilà.

— C’est incroyable ! s’écria le commandant. Il n’y a que les boucaniers pour faire de pareilles choses !