IV
FRÈRE ET SŒUR.
Edmée se laissa tomber bien plutôt qu’elle ne s’assit dans un fauteuil.
Elle était brisée de fatigue.
Mais son énergique volonté la soutenait quand même.
— Mon ami, où est Noël ? demanda-t-elle tout à coup sans préliminaires, sans ambages, au colonel Renaud.
Le colonel hésita un instant, mais prenant enfin franchement une résolution, commandée surtout par la situation difficile dans laquelle il se trouvait :
— Sur la route de Paris.
— Parti ! répondit-elle en haussant les épaules d’un ton de mauvaise humeur.
— En chemin de fer… il y a une heure à peine.
— Parti ! et je ne l’ai pas vu ! fit-elle avec regret.
— Vous le verrez bientôt.
— Je l’espère bien. Il n’est point parti seul, n’est-ce pas ?
— Si fait !
— Mais… vous l’avez laissé…
— Vous le connaissez. Ce qu’il veut, il le veut bien.
— Que va-t-il faire à Paris, le savez-vous, Martial ?
— Régler, terminer certaines affaires pressantes et indispensables.
— Après ?
— Après ?
— Oui.
— Il reviendra.
— Ici ?
— Ici même.
— Dans combien de jours ?
— Huit ou dix… au plus.
— Bien, je vous remercie. Je sais ce que je voulais savoir.
Elle se tut et réfléchit.
Le colonel Martial Renaud l’examinait à la dérobée ; il se gardait bien de couper le cours de ses réflexions.
Il avait peur de donner, à la charmante jeune fille, l’occasion d’exercer l’empire qu’elle possédait sur lui.
Edmée de l’Estang était peut-être, avec son frère Noël, la seule personne devant laquelle le colonel Martial Renaud sentît fléchir son énergique volonté.
— Vous vous embarquez avant peu ? demanda-t-elle brusquement.
— Mais…