nant vite son sang-froid, elle dit en souriant à cette dernière de sa voix douce et mélodieuse :
— Ah ! c’est toi, Rosette… tu m’as fait peur.
Pâques-Fleuries avait une de ces adorables têtes mythologiques, comme seul en a rêvé et reproduit le Corrège.
Ses traits se distinguaient par une délicatesse infinie.
Ses grands yeux bleus, d’une mansuétude angélique, brillaient dans l’ovale de son pâle visage comme deux étoiles égarées et solitaires dans un firmament d’été. Une masse de cheveux, blond vif, l’encadraient délicieusement.
Grande et bien prise dans sa taille de reine, la perfection de ses formes en dissimulait la maigreur extrême.
Par malheur, une toux sèche, qui venait de temps à autre soulever sa poitrine et lui faire subir des spasmes douloureux, entourait la tête de cette enfant si frêle, si pâle et si vaillante, d’une auréole douloureuse et poétique.
De prime-abord Pâques-Fleuries imposait l’admiration ; au second regard, elle inspirait la pitié et la sympathie.
Il était facile de comprendre que dans le fond de ce jeune cœur couvait une douleur secrète et se retiraient comme dans un sanctuaire des souffrances noblement supportées.
La chambre de la Pomme, dans laquelle se trouvaient réunis nos trois personnages, différait de celle de Pâques-Fleuries.
Autant la première était simple et chaste dans sa nudité, autant celle-ci affichait un certain luxe coquet, qui aurait tourné volontiers au luxe de mauvais aloi sans la main cachée d’une fée bienfaisante.
Quoique par-ci par-là on vît traîner sur une chaise ou sur une table un bonnet, un ruban, ou un mantelet, tout y était soigneusement épousseté, nettoyé.
C’était un nid d’oiseau, quand même.
Nid de linotte soigné par une fauvette.
Pâques-Fleuries se chargeait du ménage de Rosette.
Les deux jeunes filles s’adoraient.
Elles vivaient littéralement l’une pour l’autre et l’une par l’autre.
— Vous le voyez, monsieur Lenoir, reprit Rosette de son air le plus mutin, non contente de faire son ouvrage, mademoiselle se permet de faire le mien.
— Oh ! un petit bout de feuillage seulement ! murmura Pâques-Fleuries en baissant la tête.
— Que pensez-vous de cela ? hein ?
— C’est affreux ! répondit le commis-voyageur de sa plus grosse voix.
— N’est-ce pas ?
— Certes, et cela mérite un châtiment exemplaire.
— Vous riez ! voisin.
— Dame !
— Vous osez rire !
— J’ai bien osé pleurer tout à l’heure ! fit M. Lenoir en s’approchant de Pâques-Fleuries et en la forçant doucement à quitter et à cesser son travail.
— Pleurer !… vous avez pleuré, monsieur ! dit Pâques-Fleuries en le regardant avec surprise. Vous est-il arrivé un… ?