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Son oncle s’aperçut de cette disposition de son esprit.

— Chère enfant, lui dit-il, que se passe-t-il donc en toi ? Tu n’es plus gaie comme au moment du départ, d’où vient ce brusque changement ?

— Mon Dieu, mon oncle, que cela ne vous inquiète pas, je suis comme toutes les jeunes filles, un peu folle et fantasque ; cette chasse dont je me promettais tant de plaisir m’a laissé malgré moi un fonds de tristesse, dont je ne puis me débarrasser.

— Heureuse enfant, murmura le général, qu’une cause aussi futile a encore le pouvoir de chagriner, Dieu veuille, ma mignonne, que tu restes longtemps encore dans cette disposition, et que des douleurs plus grandes et plus vraies ne t’atteignent jamais !

— Mon bon oncle, auprès de vous ne serai-je pas toujours heureuse !

— Hélas ! mon enfant, qui sait si Dieu me permettra de veiller longtemps sur toi ?

— Ne dites pas cela, mon oncle, j’espère que nous avons de longues années à passer ensemble.

Le général ne répondit que par un soupir.

— Mon oncle, reprit la jeune fille au bout d’un instant, ne trouvez-vous pas que l’aspect de la nature grandiose et sublime qui nous environne a quelque chose de saisissant qui ennoblit les idées, élève l’âme et rend l’homme meilleur ? Que ceux qui vivent dans ces solitudes sans bornes doivent être heureux !