piége et de s’être confié trop imprudemment à un homme dont la réputation était loin de le rassurer.
Voici dans quelle situation d’esprit les deux aventuriers se trouvaient vis-à-vis l’un de l’autre, une heure à peine après avoir quitté l’endroit où ils s’étaient si fortuitement rencontrés.
Cependant chacun cachait avec soin ses appréhensions au fond de son cœur ; rien n’en apparaissait au dehors ; au contraire, ils redoublaient de politesse et d’obséquiosité l’un envers l’autre, se traitant plutôt comme des frères chéris charmés de se revoir après une longue absence, que comme des hommes qui deux heures auparavant s’étaient parlé pour la première fois.
Le soleil était couché depuis environ une heure, la nuit était sombre lorsqu’ils arrivèrent à peu de distance du camp du Jaguar dont les feux de bivouac étincelaient dans l’ombre, se reflétant avec de fantastiques effets de lumière, sur les objets environnants, et imprimant au paysage abrupte de la prairie un cachet d’une majesté sauvage.
— Nous voici arrivés, dit le chasseur en arrêtant son cheval et se tournant vers son compagnon ; nul ne nous a aperçus : vous pouvez encore retourner sur vos pas sans craindre d’être poursuivi ; que décidez-vous ?
— Canarios ! compagnon, répondit le soldat en haussant légèrement les épaules d’un air de dédain, je ne suis pas venu jusqu’ici pour me morfondre à l’entrée du camp, permettez-moi de vous faire observer avec tous les respects que je vous dois que votre remarque me semble au moins singulière.
— Je me devais à moi-même de vous la faire ; qui