— Vous êtes chasseur ?
— Pour vous servir.
— C’est un beau métier, dit le soldat avec un soupir ; moi aussi je l’ai été.
— Et vous le regrettez ?
— Tous les jours.
— Je comprends cela. Quand une fois on a goûté de la vie du désert on veut toujours y revenir.
— Hélas ?
— Pourquoi l’avez-vous quittée, puisque vous l’aimiez tant ?
— Ah ! voilà, fit le soldat ; l’amour !
— Comment, l’amour ?
— Oui, une chola dont j’eus la bêtise de tomber amoureux et qui me persuada de m’engager.
— Ah diable !
— Oui, et puis à peine avais-je endossé l’uniforme qu’elle me dit qu’elle s’était trompée à mon égard ; que j’étais, ainsi affublé, beaucoup plus laid qu’elle ne l’aurait supposé ; bref, elle me planta là sans cérémonie, pour courir après un arriero.
L’Américain ne put s’empêcher de rire à cette singulière histoire.
— C’est triste, n’est-ce pas ? reprit le soldat.
— Fort triste, répondit John Davis, en cherchant vainement à reprendre son sang-froid.
— Que voulez-vous ! ajouta mélancoliquement le soldat, le monde n’est que fourberie. Mais, fit-il en changeant de ton, je crois que notre dîner est cuit à point : je sens un certain fumet qui m’avertit qu’il est temps de retirer la marmite.
Comme naturellement John Davis n’avait aucune objection à faire contre cette résolution du soldat,