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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

insouciance fort loin de son cœur, il prit la parole.

— Je suis envoyé auprès de mon frère par un grand guerrier des Visages-Pâles.

— Je le connais ; il se nomme le Jaguar. Son bras est fort et son œil brille comme celui de l’animal dont il porte le nom.

— Bien. Le Jaguar désire enterrer la hache entre ses guerriers et ceux de mon frère, afin que la paix les réunisse, et qu’au lieu de combattre les uns contre les autres, ils poursuivent les bisons sur les mêmes territoires de chasse et se vengent de leurs ennemis communs. Quelles réponse donnerai-je au Jaguar ?

L’Indien demeura longtemps silencieux ; enfin, il releva la tête.

— Que mon frère ouvre ses oreilles, dit-il, un sachem va parler.

— J’écoute, répondit l’Américain.

Le chef reprit :

— Les paroles que souffle ma poitrine sont sincères, le Wacondah me les inspire ; les Visages-Pâles, depuis qu’ils ont été amenés par le Génie du mal dans leurs grands canots-médecines sur les terres de mes pères, ont toujours été les ennemis acharnés des hommes rouges ; envahissant leurs territoires de chasse les plus riches et les plus fertiles, les poursuivant comme des bêtes fauves partout où ils les rencontraient, brûlant leurs callis (villages) et dispersant les os des ancêtres aux quatre vents du ciel. Telle n’a-t-elle pas été constamment la conduite des Visages-Pâles ? Que mon frère réponde.

— Hum ! fit l’Américain avec un certain embar-