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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

nous touchent de beaucoup plus près. Comment vous trouvez-vous ?

— Mieux, beaucoup mieux, le remède que vous avez appliqué sur ma blessure m’a fait grand bien ; j’éprouve un indicible bien-être.

— Tant mieux ; maintenant tâchez de reposer deux ou trois heures, pendant que je veillerai sur votre sommeil, puis nous aviserons à nous sortir du mauvais pas dans lequel nous nous sommes mis.

La Peau-Rouge sourit en entendant ces paroles.

— Le Renard-Bleu n’est pas une vieille femme poltronne qu’un mal de dents ou d’oreilles rend incapable de se remuer.

— Je sais que vous êtes un brave guerrier, chef, mais la nature a des limites qu’elle ne peut dépasser, et, quels que soient votre courage et votre volonté, l’hémorragie abondante que vous a occasionnée votre blessure doit vous avoir réduit à une extrême faiblesse.

— Je vous remercie, mon frère, ces paroles sont celles d’un ami ; mais le Renard-Bleu est un sachem dans sa nation, la mort seule le doit rendre immobile. Que mon frère juge de la faiblesse du chef.

En prononçant ces paroles, l’Indien fit un effort suprême ; en se raidissant contre la douleur, avec cette énergie et ce mépris de la souffrance qui caractérisent la race rouge, il parvint à se lever, et non-seulement il se tint solidement sur ses pieds mais encore il fit plusieurs pas sans secours étranger et sans que la moindre émotion parût sur son visage.

L’Américain le considérait avec une admiration profonde ; il ne pouvait imaginer, lui qui cependant