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— Pourquoi vous haïrais-je maintenant ? D’ailleurs je suis médecin ; j’accomplis un devoir d’humanité.

— Oh ! l’humanité ! fit-il avec une indicible amertume.

Il y eut un silence.

Le Mayor semblait réfléchir.

— Ainsi, reprit-il après un instant, mademoiselle de Valenfleurs ne mourra pas ?… C’est bien ce que vous avez déclaré, n’est-ce pas ?

— J’ai déclaré, répondit Julian, que, grâce à Dieu, la blessure que vous lui avez faite n’était rien et que dans deux jours elle ne s’en ressentirait plus.

— Merci, reprit-il avec une émotion profonde ; vous me sauvez du désespoir. Maintenant, veuillez me dire franchement ce que vous pensez de mes blessures ; je souffre comme un damné, j’ai du feu dans la poitrine. Elles sont mortelles, n’est-ce pas ? Je suis un homme et un vieux soldat, ne me trompez pas… parlez sans ménagements…

— Vous avez reçu quatre blessures : deux n’ont qu’une gravité relative, les deux dernières sont mortelles ; c’est un miracle que vous viviez encore.

— Très bien ; je le savais, merci. Ce miracle ne se prolongera pas sans doute pendant longtemps. Combien me reste-t-il à souffrir encore avant de mourir ?

— Deux heures à peine.

— C’est ce que je pensais : deux heures c’est plus qu’il n’en faut ; voulez-vous adoucir pour moi les tortures atroces de ces deux heures et me rendre la mort presque douce ?

— Si cela dépend de moi, oui ! répondit franchement Julian.

— Je désire voir une dernière fois madame la comtesse de Valenfleurs.

— C’est que…

— Oh ! interrompit-il avec amertume, vous n’avez plus rien à redouter de moi, dans l’état où je suis ; d’ailleurs,