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— Je m’y engage sur ma parole d’honnête homme.

— J’accepte ; quelles garanties me demandez-vous.

— Aucune autre que votre parole de bandit.

— Soit, je vous la donne : moi, comte Philippe de Chermont de Montréal, dit le Loupeur, sur le blason de ma famille, je m’engage à vous faire retrouver la jeune fille enlevée par le Mayor, et le Mayor lui-même avant dix heures du soir. Cela vous suffit-il ?

— Je vous l’ai dit ; d’ailleurs vous voulez vous venger ?

— Oui, surtout ; j’abandonnerais volontiers ces deux cent mille francs pour avoir le plaisir d’abattre de ma main ce misérable comme un chien enragé !

— C’est bien ; j’ai votre parole de gentilhomme et de bandit, cela me suffit ; je compte sur vous.

— Vous avez raison.

Que l’on ne soit pas étonné de voir un scélérat mis au ban de la société arguer de sa noblesse et le prendre de très haut en parlant de son écusson ; il en a toujours été ainsi de noble à vilain.

En ceci comme en bien d’autres choses, la noblesse est logique, elle se souvient de son origine.

Nos nobles d’aujourd’hui sont bien, pour la plupart, des descendants directs des barons pillards qui allaient à la proie ou s’enrôlaient dans les compagnies d’écorcheurs.

Les mœurs se sont modifiées, le fond est toujours resté le même.

Le fameux Bouchard, sire de Montmorency, le premier baron chrétien, lequel vivait au dixième siècle, n’était-il pas un chef de brigands et de pirates d’eau douce ! Le duc d’Angoulême, fils posthume de Charles IX — de sanglante mémoire — et de Marie Touchet, qui faisait de la fausse monnaie et qui s’étonnait que ses domestiques lui réclamassent des gages, son hôtel étant situé sur un carrefour où aboutissaient quatre rues, et ce comte de Charolais, prince du sang, qui s’amusait, pour passer le temps, à tuer à coups de fusil les couvreurs sur les toits, qu’étaient-ils ?

Nous nous arrêtons ; la liste serait inépuisable.