Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/268

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mains, lui passait vivement une cordelle, fine comme du fouet, mais très solide, autour des pouces, à la naissance des ongles, et d’un coup brusque il la serra avec force.

Le bandit poussa un cri de douleur horrible et se tordit avec angoisse.

La souffrance avait dû être effroyable.

— Sacré Dieu ! s’écria-t-il d’une voix rauque, vous me faites mal, nom d’un nom ! laissez-moi, tonnerre !

— Cela n’est encore qu’un avertissement, reprit l’Américain, toujours impassible ; veux-tu parler, oui ou non ?

— Si je l’veux ! Je l’crois bien, que je l’veux ! j’suis plus d’à moitié mort ! Oh ! là, là ! s’écria-t-il en geignant, s’il y a du bon sens à tourmenter ainsi un bon garçon !

— Eh bien, parle !

— Détachez-moi, d’abord.

— Soit ! mais prends garde, sois sage !

— Y a pas de soin, vous allez voir !

L’Américain fit un signe.

Les deux hommes lâchèrent le bandit, mais, après l’avoir détaché, ils restèrent près de lui.

Fil-en-Quatre leur lança un regard sournois en dessous, en secouant les épaules avec un geste inimitable de gausserie parisienne.

Et, se tortillant comme une vipère, il dit, de sa voix enrouée, traînarde et gouailleuse :

— Qu’c’est bête de disloquer comme ça les gens ! comment qu’j’pourrai travailler d’mon état à c’t’heure, avec les pouces en compote ! malheur !

L’Américain fixa sur lui un regard d’une expression telle, que le bandit frissonna, et que toute son effronterie tomba subitement.

— C’est bon, dit-il en grommelant, on y va ; faites sortir vos larbins, y n’ont pas besoin d’savoir ce qu’j’vais vous dire.

— Allez, dit l’Américain aux trois hommes, mais ne vous éloignez pas hors de la portée de la voix.

Les trois hommes sortirent sans prononcer un mot.