Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/263

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’endroit dans lequel on l’avait enfermé était obscur et noir comme un four.

La première pensée logique qui se fit jour dans son esprit fut que les auteurs de son arrestation étaient des sergents de ville, ou des agents de police, qui, par hasard, l’avaient surpris pendant qu’ils faisaient une ronde et l’avaient pincé. Et tout naturellement, il supposa qu’on l’avait conduit au poste et enfermé dans le violon, en attendant la voiture cellulaire qui, en passant, le prendrait et le transporterait à la Préfecture de police.

La perspective était des plus désagréables pour Polyte.

Il avait toutes espèces de raisons, plus graves les unes que les autres, de ne pas renouveler connaissance avec la justice.

D’abord parce qu’il avait été condamné pour vol avec effraction à vingt ans de travaux forcés, et que, ayant réussi à s’échapper du bagne de Rochefort, où il était détenu, depuis six ans qu’il s’était évadé et qu’il jouissait d’une trop longue impunité, il avait commis, seul ou avec certains complices, une foule très longue de méfaits, dont la plupart entraînaient la peine capitale.

Les idées du bandit n’étaient nullement couleur de rose.

La nuit tout entière s’écoula pour lui dans des transes terribles.

— Mon affaire est claire, murmurait-t-il parfois. Quel fichu sort ! Moi, qui avais si bien réussi a ne pas me faire pincer par les plus malins, je m’suis laissé prendre comme un imbécile ! C’est trop fort de café. Brigand de Loupeur, va, si j’suis fauché, tu la dans’ras avec moi ! Oh ! ça, tu peux en être sûr !

Tous les scélérats sont de la même trempe.

Dès qu’ils se sentent pris, leur premier mouvement est de rejeter sur d’autres la faute qu’ils ont commise de se laisser prendre.

Ils ne pensent plus qu’à une chose, se venger de leurs complices, plus heureux ou plus adroits qu’ils ne l’ont été.

D’ailleurs, ils ont une peur atroce de mourir seuls, c’est pour eux une consolation, et presque une joie, de