Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/239

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

surveillant attentivement le déjeuner, elle tricotait un bas de laine avec une ardeur fébrile.

C’était la misère cachée qui se respecte et se résigne, mais avec tout son parfum d’honnêteté et cette auréole que donne le malheur vaillamment et noblement supporté.

En pénétrant dans cette pièce, avant même qu’un mot eût été prononcé, le commissionnaire, au premier regard, avait été édifié sur le compte des habitants de cette pauvre demeure.

— Que désirez-vous, monsieur ? lui dit le vieillard en se levant et lui offrant une chaise.

Le commissionnaire refusa poliment, et s’acquitta de son message avec la plus parfaite convenance ; en peu de mots, mais en termes presque choisis.

Les pauvres gens se montrèrent très affectés de l’indisposition de leur bienfaitrice, sur le compte de laquelle leur reconnaissance ne tarissait point.

Ils trouvaient pour l’exprimer des mots venant véritablement du cœur, et leurs yeux étaient pleins de larmes en parlant des deux anges, ainsi qu’ils nommaient les deux dames, dont l’inépuisable bonté faisait luire un pur rayon de soleil dans leur misérable mansarde.

Il fallut que le commissionnaire insistait pour que le vieillard se décidât à ouvrir la lettre, dont il s’échappa un billet de banque de deux cents francs.

— Oh ! s’écria-t-il avec une émotion profonde, en essuyant les larmes qui inondaient son visage ; cette somme est en ce moment une fortune pour nous : elle ne pouvait arriver mieux à point ! et pourtant, je la donnerais volontiers pour être assuré que notre bienfaitrice est bien portante.

Le commissionnaire était plus ému qu’il ne lui convenait de le laisser paraître.

Il rassura de son mieux ces braves et dignes gens et se retira en les assurant que madame de Valenfleurs ne les oublierait pas, et que bientôt ils recevraient sa visite.