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la mesure de l’homme contre lequel vous allez avoir à lutter.

— Je vous remercie de ces renseignements, monsieur ; mais ils ne m’effraient pas, reprit le policier avec un sourire amer, j’en ai vu bien d’autres ! je suis blasé sur la peur. Cet homme est donc colossalement riche pour disposer ainsi d’une aussi formidable armée de coquins ?

— Oui, monsieur, il est très riche.

— Alors, ce ne sera pas facile. Cette affaire me semble même d’une difficulté immense ; je ne me suis jamais trouvé, pendant ma longue carrière de policier, en face d’une énigme aussi complète : l’homme que nous voulons découvrir ne doit pas avoir de complices, dans la banale acception du mot ; les bandits dont il se sert, et que je connais pour la plupart, ne sont employés par lui qu’à titre de comparses ; ils ne savent rien, j’ai interrogé avant de venir un certain Fil-en-Quatre, arrêté cette nuit par vous ; j’ai écouté avec soin tout ce qu’il m’a dit, je l’ai étudié et retourné de toutes les façons, mais en vain ; on le paie, il agit, mais il ne sait rien. Je suis contraint de convenir que tout nous échappe ; que nous ne possédons pas le plus léger fil pour nous guider ; il est évident pour moi que le commissaire de police et les sergents de ville dont on m’a parlé n’existent pas, la façon dont ces soi-disant agents ont procédé me le prouve.

— Vous concluez ?

— Je conclus que vous ne m’avez rien dit de trop, que nous sommes en face d’un homme, qu’il soit ou non le marquis de Garmandia, non seulement d’une habileté prodigieuse, mais qui, grâce à sa grande fortune, dispose d’une énorme puissance.

— À la bonne heure ! je reconnais maintenant que vous voyez aussi clair que moi, et que vous comprenez cette affaire comme elle doit l’être. Alors, à votre avis, comment devons-nous procéder avec ce misérable ?

— Par la ruse et par le mystère, monsieur, surtout agir, en apparence du moins, régulièrement, c’est-à-dire porter plainte au parquet, insister à la Préfecture dans les