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et si mystérieuses et miss Lucy Gordon, la demoiselle de compagnie de sa chère Vanda.

Mais cette pensée, qui lui traversa l’esprit comme un jet de flamme, lui sembla si impossible, si absurde même, qu’il la rejeta aussitôt.

En effet, il n’était pas admissible que miss Lucy Gordon se fût ainsi hasardée à sortir seule et à pied, à travers les rues de cette immense ville de Paris, qu’elle connaissait à peine, et qu’elle n’avait jamais vue que par la portière d’une voiture.

Et puis, pourquoi cette sortie furtive ? Dans quel but se serait-elle ainsi risquée dehors ? Elle n’avait ni parent, ni ami, ni même de simples connaissances à Paris. Comment aurait-elle quitté l’hôtel à l’insu de la comtesse de Valenfleurs ou de Vanda, près desquelles elle restait constamment ?

Cependant le jeune comte était dans une situation tellement bizarre, qu’il jugea prudent de prendre certaines précautions pour qu’un fait semblable ne se renouvelât pas.

Il était de la plus haute importance, à cause des événements survenus depuis quelques jours, que personne ne pût ni entrer dans l’hôtel, ni en sortir secrètement.

Aussitôt rentré, au lieu de se rendre dans son appartement pour changer de toilette, il se dirigea vers le jardin.

Le jardinier chef, aidé par ses garçons, était occupé à sortir de la serre les orangers et les plantes rares pour les distribuer à leurs places habituelles pendant l’été dans les massifs.

Le jeune homme s’approcha du maître jardinier, échangea quelques paroles avec lui, puis il lui dit sans transition :

— Mon cher monsieur Bardot, faites-moi donc le plaisir de prendre avec vous un ou deux de vos aides, avec quelques planches de chêne assez épaisses, de longs clous et des marteaux, et de me suivre jusqu’au fond du parc ; j’ai cru m’apercevoir tout à l’heure que la porte condamnée n’était pas solide ; je voudrais la faire consolider devant moi, de telle sorte qu’il fût impossible de l’ouvrir.

— En effet, monsieur le comte, répondit le maître jar-