Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/438

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Madame, je suis la mère de Vanda ; j’aime ma fille au-dessus de tout ; et pourtant, madame, bravant résolument tous les risques que je puis courir, car je suis épiée et suivie, je le sais, je me suis échappée pour vous prévenir des mauvais dessins de ce misérable, et vous supplier, au nom de Dieu, madame, de ne jamais vous séparer de Vanda, sur laquelle je vous donne tous mes droits.

Et, sortant de dessous son châle un paquet de papiers assez volumineux, elle le présenta à la comtesse :

— Prenez ces papiers, je vous en prie, madame.

— Mais, quels sont ces papiers ?

— L’acte de naissance de ma fille, son extrait de baptême, enfin toutes les pièces nécessaires pour établir son état-civil au point de vue de la législation française, puis des pièces émanant de la chancellerie mexicaine, un acte notarié par lequel je vous nomme tutrice de ma fille ; enfin, un testament écrit tout entier de ma main, où je raconte tout au long ma triste histoire, et dans lequel je la fais héritière de tous les biens qui doivent me revenir à la mort de mes parents. Vous trouverez là tous les papiers nécessaires, en espagnol et traduits en français ; toutes ces pièces sont légalisées en due forme, et ne peuvent pas être taxées de mensongères. J’ai eu beaucoup de peine à me les procurer, mais les voici enfin en sûreté entre vos mains ; je n’ai pas besoin de vous dire, madame, qu’une seule de ces pièces suffirait pour perdre ce misérable, s’il ose s’attaquer à vous.

— J’accepte votre dépôt, madame, pour le bonheur de votre fille ; mais croyez bien que je serai toujours prête à vous la rendre, si vous me la demandez un jour.

Doña Luz hocha la tête avec tristesse.

— Je vous supplie, madame, de la garder près de vous : surtout il ne faut pas qu’elle connaisse son père, ni qu’elle sache jamais qu’elle est la fille d’un tel monstre.

— J’admire votre dévouement, madame, mais vous ?…

— Moi, hélas ! que suis-je pour ma fille aujourd’hui ?