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combattre côte à côte, nous nous trouvons dans des camps opposés : la fatalité le veut ainsi ; peut-être un jour ces malheureuses dissensions se termineront-elles, et alors qui sait si nous ne serons pas amis ?

— Nous le sommes déjà, caballero, s’écria chaleureusement le capitaine, et il tendit la main au Jaguar.

Celui-ci la serra vivement dans la sienne.

— Suivons chacun la route qui nous est tracée, dit-il, mais si nous défendons une cause différente, conservons en dehors de la lutte cette estime et cette amitié que se doivent deux ennemis loyaux qui se sont mesurés et ont trouvé que leurs épées étaient de la même longueur.

— Soit, dit le capitaine.

— Un mot encore, reprit le Jaguar ; je dois répondre à votre franchise par une franchise égale.

— Parlez.

— La question que je vous ai adressée vous a surpris, n’est-ce pas ?

— Je l’avoue.

— Eh bien ! je vais vous dire pourquoi je vous l’ai faite.

— À quoi bon ?

— Non, il le faut ; entre nous, il ne doit plus y avoir rien de caché. Malgré la haine que je devrais vous porter, je me sens entraîné vers vous par une sympathie secrète que je ne puis m’expliquer, mais qui me pousse à vous révéler un secret dont dépend le bonheur de ma vie.

— Je ne vous comprends pas, caballero ; vos paroles me semblent étranges. Expliquez-vous, au nom du ciel.