Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/45

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ponner comme un reptile après chaque brin d’herbe ou chaque buisson qu’on rencontrait, sous peine d’être enlevé par le vent qui sifflait avec fureur, d’être ballotté dans l’espace et brisé comme une coquille de noix contre les parois du gouffre.

Les premières minutes furent surtout terribles pour le hardi aventurier : les pieds et les mains ont besoin de s’habituer au rude labeur qui leur est imposé, ce n’est que graduellement qu’ils arrivent pour ainsi dire instinctivement à trouver leurs points d’appui ; cette observation, qui peut paraître erronée à certaines personnes qui heureusement pour elles ne se sont jamais trouvées dans l’obligation d’en faire l’expérience, sera reconnue d’une rigoureuse justesse par tous les hommes qui ont voyagé et se sont vus dans l’obligation de monter ou descendre des montagnes. Au bout de quelques minutes, lorsque l’esprit demeure libre, le corps prend de lui-même l’équilibre nécessaire, les pieds rencontrent les points d’appui solides, et les mains se posent sans hésiter sur les herbes ou les racines qui leur offrent le degré de résistance indispensable.

À peine avait-il descendu une dizaine de pieds que John Davis se trouva sur une saillie assez vaste couverte d’épais buissons ; jusque-là la descente avait été extrêmement rapide.

S’éclairant avec sa torche, l’Américain parcourut dans tous les sens cette espèce d’esplanade qui avait environ une douzaine de pieds de tour ; en examinant avec soin les buissons épais qui la couvraient, l’aventurier reconnut que la cime en était froissée et rompue comme si elle avait reçu un choc puissant.