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LES FRANCS TIREURS.


XVIII

LA PULQUERIA.


Le jour même où nous reprenons notre récit, au coup de canon tiré par le fort qui commande l’entrée du port de Galveston, pour annoncer le coucher du soleil dont en effet le disque étincelant achevait de disparaître dans la mer en colorant au loin l’horizon de teintes rougeâtres, la ville, qui durant tout le jour avait été, à cause de la chaleur, plongée dans une torpeur morne et triste, se réveilla tout à coup en poussant vers le ciel une longue et joyeuse clameur.

Les rues, jusque-là solitaires, se peuplèrent comme par enchantement d’une foule immense, qui s’échappait en désordre de toutes les maisons, tant elle avait hâte de respirer l’air frais du soir que la brise de mer lui apportait sur ses ailes humides ; les boutiques s’ouvrirent et s’illuminèrent d’un nombre infini de fallots en papier de couleur.

Enfin, ce fut bientôt dans cette ville où, une heure à peine auparavant, régnait tant de silence et de recueillement, un pêle-mêle et un tohu-bohu d’individus de toutes classes et de tous pays, Espagnols, Américains, Mexicains, Français, Anglais, Russes et Chinois, chacun revêtu de son costume national ; de femmes coquettement drapées dans leurs rebozos, lançant à droite et à gauche des œillades effrontées ; de marchands ambulants vantant