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II

DIPLOMATIE INDIENNE.


La nuit s’écoula calme et paisible. Au moment où le soleil paraissait à l’horizon, salué par le concert assourdissant des oiseaux cachés sous la feuillée, le Renard-Bleu, qui jusque-là était demeuré immobile, étendit le bras droit dans la direction du moine, couché auprès de lui, et le toucha légèrement avec la main.

Cet attouchement, tout léger qu’il fût, suffit cependant pour réveiller fray Antonio.

Il est des circonstances dans la vie où, bien que le corps repose, l’esprit cependant conserve toute sa finesse de perception et toute sa vigilance ; le moine se trouvait dans une de ces situations. La mansuétude dont les Apaches avaient, le soir précédent, fait preuve à son égard, était tellement extraordinaire et en dehors de leurs habitudes vis-à-vis des blancs, leurs ennemis acharnés, que le moine, malgré toute l’insouciance qui formait le fond de son caractère, avait compris que la conduite étrange des hommes entre les mains desquels il était tombé devait avoir des motifs bien puissants, et que, malgré les semblants d’amitié dont ils l’accablaient, il ferait bien de se tenir sur ses gardes, afin d’être prêt à faire tête à l’orage, de quelque côté qu’il vînt.

À la suite de ce raisonnement, tout en profitant des bonnes dispositions des Indiens, il avait sour-