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des lueurs fugitives qui perçaient le couvert pour s’assurer un abri pour la nuit.

En face de lui s’élevait un majestueux chêne-acajou, dont les branches entrelacées et l’épais feuillage semblaient lui offrir une retraite sûre contre les attaques probables des hôtes sombres de la forêt.

Certes, dans toute autre circonstance que dans celle où il se trouvait, la seule pensée d’escalader cet arbre immense aurait paru au moine le comble de la folie et de l’aberration mentale, à cause de sa puissante rotondité, d’abord, puis de sa maladresse, dont il avait l’intime conviction.

Mais le moment était critique, à chaque instant la situation se faisait plus dangereuse, les hurlements se rapprochaient d’une façon inquiétante, il n’y avait pas à hésiter : fray Antonio n’hésita pas.

Après avoir tourné deux ou trois fois autour de l’arbre, afin de chercher l’endroit qui lui offrirait le plus de facilité pour son ascension, il poussa un soupir, il embrassa le tronc énorme et raboteux des bras et des genoux, et commença péniblement sa tentative d’escalade.

Mais ce n’était pas chose facile, surtout pour un moine pansu, que de se hisser sur ce chêne ; fray Antonio s’en aperçut bientôt à ses dépens, car chaque fois qu’après des efforts inouïs il parvenait à s’élever à quelques pouces du sol, soudain les forces lui manquaient, il dégringolait en bas et roulait sur la terre, les habits déchirés et les mains ensanglantées.

Dix fois peut-être il avait déjà renouvelé ses efforts, avec cette persévérance que donne le déses-