Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/111

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Que le chasseur pâle demeure, le cœur du Cerf-Noir est sans détours pour lui. La sagesse de mon frère est grande ; il a été élevé par les Peaux-Rouges ; sa place est marquée au feu du conseil.

— Mais peut-être avez-vous à dire au Cœur-Loyal des choses qui ne regardent que vous.

— Je n’ai rien à dire que mon frère ne puisse entendre, mon frère me désobligera en s’éloignant.

— Je demeurerai donc, chef, puisqu’il en est ainsi.

En disant ces paroles le chasseur reprit sa place.

— Parlez, chef, reprit-il, je vous écoute.

Le méthodique Indien saisit son calumet, et pour montrer l’importance qu’il attachait à la mission dont il était chargé, au lieu de le bourrer avec du tabac ordinaire, il le remplit avec du morhichée ou tabac sacré, qu’il sortit d’un petit sac en parchemin renfermé dans la gibecière que tous les Indiens portent en voyage, et qui renferme leur sac à la médecine et les quelques ustensiles indispensables pour une longue route ; puis lorsque le calumet fut bourré, il l’alluma avec un tison qu’il prit dans le feu au moyen d’une baguette-médecine ornée de plumes et de grelots.

Ces préparatifs extraordinaires firent supposer aux chasseurs qu’en effet le Cerf-Noir était porteur de nouvelles sérieuses, et ils se préparèrent à l’écouter avec toute la gravité convenable.

Le sachem aspira deux ou trois bouffées de fumée, puis il passa le calumet à Tranquille qui l’imita et le passa à son tour au Cœur-Loyal.

Le calumet continua ainsi à circuler à la ronde tant que le tabac ne fut pas consumé.