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dedans de lui-même les sentiments qui l’agitaient, et comprenant ce que son silence prolongé devait avoir d’extraordinaire pour les étrangers qui depuis longtemps déjà attendaient qu’il leur adressât les compliments de bienvenue qu’exige l’étiquette de la coutume indienne, il se décida enfin à prendre la parole :

— Que le sachem s’approche sans crainte et prenne place au foyer d’un ami, dit-il.

— La voix du chasseur pâle a réjoui le cœur du chef, répondit le guerrier, son invitation lui plaît ; il fumera avec lui le calumet de l’amitié.

Le Canadien s’inclina poliment, le sachem fit signe à sa compagne de le suivre, et il alla s’accroupir sur ses talons devant le brasier, à une légère distance du Cœur-Loyal et de Lanzi toujours endormis.

Tranquille et le guerrier commencèrent alors à fumer silencieusement, tandis que la jeune Indienne s’occupait activement à vaquer à tous les soins du ménage, c’est-à-dire à préparer le repas du matin.

Les deux hommes la laissaient faire, sans paraître s’apercevoir de la peine qu’elle se donnait.

Il y eut un assez long silence. Le chasseur réfléchissait ; l’Indien semblait être complètement absorbé par l’occupation à laquelle il se livrait.

Enfin, il secoua la cendre de son calumet en repassa le tuyau à sa ceinture, et se tournant vers son hôte :

— Le valkon[1] et le mawkavis[2] font toujours entendre le même chant, dit-il ; celui qui les a écou-

  1. Oiseau de paradis.
  2. Espèce d’alouette.