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Le Forestier

Cristiana était l’aînée.

L’homme au-devant de qui venaient ces trois personnes se nommait Santiago Lopez ; il était le mari de Maria Dolores et le père des deux anges blonds qui s’étaient jetés dans ses bras aussitôt qu’il s’était trouvé à leur portée.

Le chasseur débarrassé de ses armes et de son gibier, tous quatre entrèrent dans la chaumière et s’assirent autour d’une table sur laquelle un repas substantiel était préparé, et après une courte prière prononcée à haute voix par le père, ils commencèrent à déjeuner de bon appétit.

Profitons du moment où cette famille aux mœurs patriarcales prend paisiblement son repas pour raconter en quelques mots son histoire, ou du moins ce qu’on savait de cette histoire, ce qui n’était pas grand’chose.

Un jour, il y avait seize ou dix-sept ans de cela, un homme âgé d’une trentaine d’années au plus, venant du côté de Tolède, était arrivé dans la vallée alors complètement déserte.

L’étranger était suivi d’une vingtaine d’ouvriers et de plusieurs mules chargées de vivres, d’outils et de matériaux de toutes sortes, conduites, par des arrieros qui portaient non pas le costume castillan ou andalou, mais celui des provinces basques.

Après avoir visité la vallée, et l’avoir pour ainsi dire étudiée sur toutes les faces, l’étranger avait semblé fixer son choix sur la partie la plus reculée ; il fit un signe aux ouvriers qui, après avoir aidé les arrieros à décharger les mules, s’étaient immédiatement mis à la besogne avec une grande ardeur.

Les uns construisaient une maison, ou plutôt une chaumière, les autres défrichaient une assez grande étendue de terre, pour faire un enclos d’abord, puis plusieurs champs assez vastes.

Le terrain n’appartenant à personne, on pouvait en prendre tant qu’on voulait.

Jamais, depuis des siècles, si grande animation n’avait régné dans cette vallée ; les arbres tombaient avec fracas, étaient sciés et préparés pour former les murailles ; les forgerons et les serruriers travaillaient sur des forges portatives ou des établis improvisés ; personne ne restait inactif.

L’étranger surveillait les travaux, expliquait ses plans et donnait des conseils.

Bref, les travaux furent menés avec une telle activité qu’en moins d’un mois la chaumière, haute d’un rez-de-chaussée et d’un premier étage, parfaitement distribuée à l’intérieur, et complètement construite en bois, était